PANORAMA 1, Etienne Ruhaud (Unicité, 2024)

Si j’ai souhaité chroniquer le dernier livre d’Etienne Ruhaud, Panorama 1, une somme conséquente d’articles et d’entretiens avec des auteurs menés sur les quinze dernières années, c’est que sa démarche me parle. Quand on aime la littérature et qu’on s’y adonne soi-même, on est à l’affût de ce qui nous nourrit dans la création contemporaine. Les activités d’auteur et de critique littéraire ne s’opposent nullement et au contraire se complètent. Les articles d’Etienne Ruhaud sont toujours précis et rigoureux. La variété des styles et des époques abordées, de Bernardin de Saint-Pierre à Michel Houellebecq, prouve une réelle ouverture d’esprit avec quelques constantes – la poésie, le surréalisme. Etienne Ruhaud donne surtout la parole à des auteurs plus “indépendants” et leur offre l’occasion de détailler leur esthétique. Quel plaisir de lire des entretiens uniquement consacrés à la pratique littéraire et non à des sujets de société, angle souvent utilisé par la presse généraliste pour réduire l’oeuvre à un symptôme de l’époque. Ainsi, Eric Dubois peut revendiquer “la trivialité du réel”, qui tranche avec “la belle poésie” et Jacques Cauda (également illustrateur de l’ouvrage) évoquer l’influence d’Artaud ou du cinéma d’Antonioni. Pour un auteur, mettre son ego de côté pour donner la parole aux autres est sans doute l’élégance suprême. Nous espérons qu’Etienne Ruhaud poursuivra, en parallèle de ses propres livres, ce travail de défricheur, de passeur, qui reste essentiel.